Henry Ford & citation
Le 12 mai 2015

La méthode « voix du client », présentée par la consultante américaine Jeanne Bliss sur son  blog,  illustre bien un discours très en vogue mais simpliste : il suffirait  d’écouter ce que le client raconte sur internet et de faire ensuite ce qu’il demande. Dans la réalité, c’est malheureusement un peu plus compliqué.

Ceux qui tiennent ce genre de discours lénifiant sont le plus souvent les vendeurs de solutions de « Customer Feedback Management » et les consultants qui les accompagnent.  A les écouter, il suffirait de pomper des données sur internet pour repérer les « fissures dans les fondations* », de quantifier les problèmes, puis de transmettre les plus nombreux aux personnes compétentes qui les règleront. Et voilà. C’est facile la vie d’un Chief Customer Officer ! Et d’ajouter : « Quand vous aurez musclé votre organisation pour qu’elle soit capable de régler vos problèmes actuels de fiabilité, vous pourrez vous attaquer au travail plus gratifiant qui consiste à imaginer un avenir meilleur pour vos clients ».

Je ne partage pas du tout ce point de vue pour 3 raisons majeures :

  • Le mode de détermination des priorités est erroné. Ce n’est pas parce qu’un sujet est le plus cité par les clients qu’il est le plus important…Il y a des aspects essentiels sur lesquels les clients s’expriment peu et qui les rendent infidèles. Et d’autres sur lesquels ils s’expriment beaucoup et qui ne sont pas déterminants. La sélection des priorités d’actions est une étape capitale, trop souvent négligée par des solutions de type « Customer Feedback Management ». Par ailleurs, changer les pratiques dans une organisation est un exercice difficile qui nécessite de faire les bons choix, de les expliquer et de s’y tenir. Si on diffuse la voix du client « au robinet », on va lancer les opérationnels d’une priorité à l’autre. Et ils vont s’épuiser…pour rien.
  • Il ne suffit pas de distribuer les problèmes aux personnes concernées pour qu’ils soient réglés et que le service rendu au client s’améliore. Le pilotage de l’ «exécution » est un enjeu essentiel (le « problème client » sera-t-il bien interprété, va-t-on trouver la bonne solution, la décision de l’appliquer sera-t-elle prise, l’application sera-t-elle réelle et, finalement, règlera-t-elle le « problème client » du départ ?). Toutes ces questions méritent un suivi.
  • Réfléchir à l’avenir n’est pas une option. Si on devait attendre de faire à la perfection ce qui est prévu avant d’ « imaginer un avenir meilleur pour [nos] clients», on en serait encore à optimiser la chaîne de la Ford T. Et on aurait raté 100 ans de progrès automobile… Il va de soi qu’il faut à la fois améliorer la fiabilité de l’existant et imaginer l’avenir. A trop mettre l’accent sur la résolution des « problèmes client », on se sclérose. C’est d’ailleurs Henry Ford qui disait « If I had asked people what they wanted, they would have said faster horses”.

Présenter le rôle d’un Chief Customer Officer comme celui d’un distributeur de « ya qu’à faut qu’on » ne rend service à personne. Il a besoin :

  • d’analyses statistiques approfondies pour faire des choix éclairés dans la sélection des priorités
  • de beaucoup de rigueur dans le contrôle de l’exécution et de l’impact client des décisions d’amélioration
  • d’une vraie volonté de surprendre et de séduire le client avec de nouvelles propositions.

 

*Les citations entre guillemets et en italiques sont des traductions d’extraits de l’article de Jeanne Bliss

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