Le 12 janvier 2017

L’analyse des affaires perdues, notamment en B2B, est trop rare. En dépassant le prétexte du prix, elle suscite pourtant une réflexion très riche sur la démarche commerciale, mais également sur l’offre en elle-même.

Personne n’a envie de se retourner sur ses échecs, surtout si d’autres occasions de gagner s’offrent immédiatement à nous. Les directions commerciales, au nom de la motivation des troupes, n’aiment pas s’arrêter sur les affaires perdues. Les directions marketing n’ont pas envie d’engager un combat frontal (et perdu d’avance) avec le Commerce pour imposer une réflexion sur ceux qu’on appelle pudiquement parfois les « prospects non transformés ».  Au total, très peu d’entreprises cherchent à apprendre de leurs échecs.

Et pourtant, si nos ancêtres n’avaient pas décortiqué collectivement les raisons pour lesquelles ils échouaient à attraper les antilopes, ils n’auraient jamais mis au point les tactiques sophistiquées de chasse qui ont permis à un groupe d’humains de se saisir d’un animal qui court 3 ou 4 fois plus vite qu’eux.

Pour transformer l’échec en apprentissage, les entreprises pourraient se poser 4 questions et en tirer des conclusions très opérationnelles.

Quel est notre taux de transformation ?

D’abord, mesure-t-on ce taux de transformation ? C’est rarement le cas et c’est un premier indice de cécité volontaire. Ce qui compte, c’est tout autant l’analyse du nombre d’affaires gagnées que celle du nombre d’affaires tentées. On en retirera de nombreuses informations utiles sur l’ampleur de l’effort commercial, la pertinence du ciblage, etc… Et la possibilité de répondre aux 3 questions qui suivent : c’est souvent l’inexistence du fichier des affaires perdues qui tue dans l’œuf toute velléité de réflexion.

Quel rôle avons-nous joué dans la consultation ?

Certaines circonstances rendent le succès quasi-impossible : le comportement antérieur du prospect (son historique d’achats notamment), le stade du processus d’achat au cours duquel nous avons été consultés (on peut être utilisé comme figurant ou comme lièvre dans un processus d’achat déjà bouclé), etc… Pour autant, il s’agit là d’explications et non pas d’excuses : on pourra utilement se demander si le rôle qui nous a été ainsi dévolu n’est pas le reflet d’une notoriété ou d’une image insuffisantes.

Le prix ! What else ?

Faites le test, envoyez un simple mail à votre force de vente en demandant de lister les raisons d’échec de leurs 10 dernières affaires perdues. Je vous parie que le critère « prix » arrivera systématiquement en tête des motifs invoqués. Ce n’est certainement pas totalement faux ; c’est même probablement l’explication qui leur aura souvent été donnée par le prospect (c’est plus simple et moins vexant).

Mais ne vous arrêtez pas à cette réponse qui n’est au fond qu’un prétexte facile. Et demandez « What else ? ». C’est à partir de la deuxième raison que ça devient intéressant et qu’il faut creuser. Les stratégies low cost ne reposent pas sur un prix bas, mais sur un équilibre qualité-prix réinventé. Nous sommes très peu nombreux à choisir systématiquement le prix le plus bas. Vous êtes d’accord et vous vous demandez pourquoi je développe autant ce point ? Alors dites-moi pourquoi vous vous laissez systématiquement enfumer par ce prétexte invoqué par votre force de vente ?

Qui a gagné et pour quelle raison principale ?

Votre prospect perdu révèlera peut-être plus facilement votre point faible en exprimant… le point fort de votre concurrent. Et, même si il évoque le prix, il dira toujours spontanément : « votre concurrent était moins cher et en plus il proposait… ». C’est ce qu’il proposait « en plus » qui vous faisait défaut ou que vous n’avez pas bien su expliquer.

Alors, vous commencez quand à analyser vos affaires perdues ? Un dernier conseil. Débriefez autant que vous voulez vos commerciaux, c’est utile ; mais il faut bien comprendre que leur perception est biaisée. Faites également appel à un tiers, un spécialiste extérieur à l’entreprise ou un membre d’une fonction support (qualité, marketing…). Et ne craignez surtout pas la réaction de vos prospects : ils participent le plus souvent bien volontiers à la démarche et garderont une image très positive de votre entreprise.

bruno.francois@lavoixduclient.fr

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